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(Jogging International - n° 322 - Août 2011)
Courir pieds nus, à l'occasion d'une épreuve officielle, n'est plus un épiphénomène...
Frédéric Brossard, rédacteur à "Jogging International" et aussi éminent spécialiste - et pratiquant - du minimalisme et de la chaussure qui va avec, nous avait conviés, Christian Harberts et moi, à participer aux 10 km de La Celle-Saint-Cloud organisés comme tous les ans par son Club : pour courir, bien sur, mais aussi présenter à cette occasion le barefoot running.
Une occasion pour se rencontrer entre coureurs : une centaine de pratiquants "classiques", ceux qui courent normalement, avec aux pieds des chaussures de running, et deux autres plus atypiques,... qui n'en portent pas ! Christian est à un an à peine de son début de transition au minimalisme. Moi, bientôt trente ans que j'ai repris la course à pied àprès mon accident, et en "choisissant " de le faire pieds nus...
Une merveilleuse matinée, chaude et ensoleillée, telle que je l'ai vécue : une course de plus pour moi, et un nouveau moment d'échange, de démonstration, d'explication,... Ceux qui me connaissent savent que les deux me passionnent !! On y va.
Chronologie de la course...
Première question à la remise des dossards : "Où allez-vous accrocher la puce, si vous ne portez pas de chaussures ?"... Je sors en souriant mon rouleau de sparadrap : deux tours autour de la cheville : le truc est en place, la dame est rassurée !... "Vous êtes inscrits dans une catégorie particulière ?"... Non,.. euh, je ne crois pas...en V3, c'est tout ! Je cours comme tout le monde, et ce n'est pas parce que vous voyez mes pieds que... Bon, voilà, c'est fait, le dossard est épinglé, la dame me regarde partir avec des yeux inquiets et un air dubitatif... elle doit prier pour moi, je suis sur...
Le speaker me demande de venir au micro annoncer au public ce scoop sans précédent ! (tout au moins le croit-il, alors je démens : les "ultra-minimalistes" ne sont pas nombreux, mais ils courent régulièrement...). Quelques phrases pour parler de ce non-évènement, expliquer que cela n'est ni une opération kamikaze ni un pari de potaches, et surtout donner rendez-vous aux coureurs intéressés par le minimalisme à venir après l'arrivée ! Ce qui rassure l'auditoire, convaincu maintenant que je survivrai !... Le tout immortalisée par mon amie Virginie Batoche, (clin d'oeil au passage à notre toute nouvelle triathlète !!), dans une vidéo :
http://youtu.be/SsVS15lGFlI
Un peu d'échauffement... Une dernière annonce bienveillante du speaker avant de partir, au cas où quelqu'un n'aurait pas été au courant que deux aliens étaient venus user leur peau sur le bitume, et sans doute... pour qu'on ne nous marche pas sur les orteils !!... Et c'est le départ, sur le tartan du Stade. Chacun ne pensant plus qu'à soi, je redeviens d'un coup un coureur comme les autres dans la masse des addicts au running !...
On quitte la piste pour attaquer la rue. Eh bien à La Celle-Saint-Cloud, les Dimanche de course à pied, il y a du monde au balcon et surtout sur les trottoirs ! Sympa, les Franciliens ! En vrac, quelques remarques glanées au coin des rues, rapportées comme dans la Tirade du Nez, de Cyrano :
Classique : "Oh, t'as vu, il court pieds nus !"
Etonné : "Il va aussi vite que les autres !"
Rassurant : "Il n'a pas l'air d'avoir mal..."
Docteur Europe1 : "Il ne doit pas sentir la douleur comme tout le monde, il a une... ah je sais plus comment ils appelent ça..."
Sectaire, limite intolérant : "Je pensais qu'il n'y avait que les Noirs qui couraient pieds nus !"
Show-Biz : "Il est comme... comment il s'appelle déjà, celui qui chante, tu sais il jouait au tennis avant ?"
Angoissé compatissant : "Si jamais il y a un bout de verre, son pied il est foutu !..."
Humanitaire : "Il court pour le sida ou le cancer... Ils font ça souvent pieds nus, je l'ai lu..."
mais surtout, je l'ai gardé pour la fin, car c'est quand même le plus souvent entendu, le plus sympa, le plus encourageant, le plus spontané : "Vas-y, Vas-y, courage !!..." Ben quoi ? Marrant, non, c'est le même que pour les autres coureurs ! Je ne suis donc pas si différent que ça ! Ouf, me voila rassuré !...
Il fait chaud ! Gauche, droite, gauche, droite... Cela n'arrête pas de tourner, c'est sinueux, La Celle ! Cela manque un peu de grands boulevards, mais le parcours est finalement bien sympa, pas ennuyeux du tout (!)... tout comme ses riverains !
Un dernier encouragement venant d'une brave dame, surement de la famille de Madame Dossards... Une question angoissée, en mode Croix-Rouge Française : "Vous allez pouvoir finir, vous êtes sur ?...". Elle avait un portable, pourvu qu'elle n'appelle pas le SAMU...
Le Stade est en vue, un petit tour de piste, la ligne d'arrivée ! Et voilà, le temps de récupérer sa bouteille d'eau, et... Ah non, la matinée n'allait pas se terminer comme cela !
"Des stars", disait Fred dans son article. Peut-être pas à ce point-là quand même... Ni Gala, ni paparazzi, ni séance d'autographes ! Mais malgré tout, je ne suis toujours pas un coureur conventionnel... D'abord, le staff d'organisation : les ciseaux à la main, un monsieur s'approche de moi. Ouf, pas de stress, c'est juste pour couper le sparadrap et récupérer la puce collée à ma cheville... Merci !
A peine le temps de boire un peu, et voilà le speaker, qui tient à rassurer l'assistance : il faut absolument que je dise au micro... comment vont mes pieds ! Une vraie fixation, le reste du bonhomme n'a pas d'importance... J'explique que j'ai plus été gêné par la température que par les aspérités du bitume, mais apparemment, cela n'est pas le centre d'intérêt. Je conclue mon bulletin de santé, podologiquement rassurant, en invitant donc les collègues curieux du minimalisme à venir me retrouver afin d'en parler.
Pas la peine, ils sont déjà là !! Quatre ou cinq coureurs intéressés et manifestement déjà documentés... surement par une certaine presse (clin d'oeil au Professeur)... On convient d'aller se rafraîchir dans le gymnase, où les organisateurs ont installé un super buffet ! Pendant ce trajet, les regards sont toujours braqués sur mes pieds. Et les premières questions aussi! Non, je n'ai pas de douleurs particulières, non les graviers de l'allée ne me font pas mal même après 10 kilomètres de course,...
Ah, mais il y en a aussi à l'intérieur, des curieux du minimalisme ! Alors tout y passe, là c'est plutôt l'inventaire à la Prévert ! Juste un bref extrait :
Les pieds, bien sur : pas de blessures !... 10 km sur du bitume rugeux, beaucoup de virages, le tout en un temps "normal" : les faits sont là, visibles, tout va bien, et je continue à pouvoir marcher pieds nus sans protection,... ni pansements !
La corne, où est-elle ? Il n'y en a pas : comment voulez vous voir quelque chose qui s'use en permanence ? Par contre, j'explique les capitons plantaires, ces coussinets très souples et arrondis en regard de chaque relief osseux. Voilà la protection de mon squelette et qui m'empêche d'avoir mal...
Les scpetiques le sont beaucoup moins, les inquiets ne le sont plus et les hésitants, ceux pour qui j'écris tout cela, sont maintenant assez largement convaincus ! Reste à bien tempérer cet enthousiasme en martelant mon slogan habituel ! é-cou-te et pro-gres-si-vi-té !!!
J'explique qu'il m'a fallu plus d'une année pour retrouver, pieds nus, mon niveau de performance antérieur ! Sans blessure ? Oh non, car j'ai tout appris sur le tas ; mes connaissances médicales m'ont certainement évité bien des problèmes, mais je ne connaissais pas encore Ken Bob Saxton, ce qui m'aurait épargné des bobos sans gravité, mais qui ne me rassuraient quand même pas pleinement. C'est de cette expérience dont je tente de faire profiter ceux qui me font le plaisir de vouloir "essayer", pour voir et sentir, au moins !
Je suis une nouvelle fois étonné du niveau d'information de certains (je dirais aussi certaines, car les femmes sont, pour moi, bien plus nombreuses que les hommes - pourquoi ? je ne sais pas, peut être plus "à l'écoute de leur corps", je crois). Comme quoi tout ce qui est écrit, et même dit puisque des médias audio-visuels ont déjà parlé de l'existence du minimalisme, commence à susciter l'intérêt...
La matinée se termine, on a du tout se dire ! Je retourne à ma voiture en compagnie des derniers interlocuteurs. Deux d'entre eux qui avaient ôté leurs chaussures ne les ont pas remises, nous sommes arrivés à deux, nous repartons à quatre... Cela ne fait que 4% des participants ! mais nous avons doublé notre effectif, avec ceux à "temps partiel" !!....
Bilan de cette course et de son environnement : "I'm happy", de quoi me motiver pour continuer à enrichir le débat, à démontrer que le pieds nus / minimalisme n'est pas une folie et qu'on peut, encore une fois, en constatant les faits et en écoutant les raisons, confirmer que le runneur n'est pas juste une machine à foulées...